Par Jean-Michel Ruiz
Rémi
Fraisse est mort, mort car il défendait ses idées. Le procureur de la République d'Albi a déclaré que la mort de Rémi
Fraisse a été provoquée par "un explosif militaire de type grenade
offensive ». Les premiers témoignages sont donc confirmés, c'est bel et
bien un tir des forces de gendarmerie qui est à l'origine du décès d'un jeune
homme de 21 ans, ni armé, ni cagoulé, dont le seul bagage était un BTS, des
convictions et une passion pour les plantes et les fleurs. La mort du
jeune Rémi Fraisse est intolérable.
La justice devra faire toute la lumière sur les
circonstances de cette tragédie. La jeunesse de notre pays a bien des choses à
exprimer, à crier et à dénoncer. Le travail républicain des forces de l'ordre
n’est-il pas, en priorité, de les protéger ? Avec des grenades offensives ?
Cette réalité est totalement insupportable.
Sans attendre les résultats de l'enquête administrative, le ministre de l'Intérieur vient de demander la suspension de l'utilisation de ces projectiles de gendarmerie. C'est bien le moins qu'il pouvait faire. Il en faut davantage. Il faut saisir le Parlement, en abordant toutes les questions sur le type d'intervention des forces de l'ordre en de tels moments, en essayant de comprendre pourquoi nous en sommes arrivés à un tel niveau de tension à Sivens ? Comment permettre à des citoyens qui défendent des idées et des valeurs, se rassemblent et s'opposent à des projets jugés inutiles, de ne pas se sentir criminalisés et menacés ?
Sans attendre les résultats de l'enquête administrative, le ministre de l'Intérieur vient de demander la suspension de l'utilisation de ces projectiles de gendarmerie. C'est bien le moins qu'il pouvait faire. Il en faut davantage. Il faut saisir le Parlement, en abordant toutes les questions sur le type d'intervention des forces de l'ordre en de tels moments, en essayant de comprendre pourquoi nous en sommes arrivés à un tel niveau de tension à Sivens ? Comment permettre à des citoyens qui défendent des idées et des valeurs, se rassemblent et s'opposent à des projets jugés inutiles, de ne pas se sentir criminalisés et menacés ?
François Hollande et le gouvernement ne semblent toujours
pas avoir pris la juste mesure de ce qui vient de se passer. La République se
manque a elle-même, quand, dans de telles circonstances, ses plus hauts
représentants ont des paroles qui tardent et des décisions qui paraissent bien
trop faibles. Les mots de Cécile Duflot, s’ils peuvent sembler excessifs, sont
pourtant justes quand elle dit que cette mort « laissera une trace
indélébile sur l’action du gouvernement ». En effet, pour les militants de
ma génération, on peut rapprocher le comportement du gouvernement
Valls/Cazeneuve de celui de la paire Chirac/Pasqua en 1986 lors de la mort de
Malik Oussékine. Ce n’est pas l’attitude scandaleuse de quelques casseurs
professionnels, dont les procédés se rapprochent plus de ceux de
l’extrême-droite, lors des cérémonies d’hommage à Rémi qui souilleront sa
mémoire et son combat. Il est à souligner que la quasi-totalité de ces moments
de recueillements se sont déroulés dans l'esprit souhaité par la famille de
Remi Fraisse avec dignité, respect, calme et détermination.
Aucun projet d’aménagement, quelle que
soit sa vocation, ne peut justifier de telles violences et la mort d’un jeune
adulte. Mais il est consternant qu’il
ait fallu, après des mois de mobilisation, la mort de ce jeune homme pour
prendre enfin en considération les motifs d’opposition à ce projet. Ce drame
aurait pu être évité en privilégiant le dialogue plutôt que l’usage de la
force. Il est tout aussi consternant d’apprendre, seulement après le début des
travaux, les conclusions d’un rapport d’expertise qui remet clairement en cause
la pertinence de ce projet au regard de son objectif de soutien à l’agriculture
intensive.
Cette situation est d’abord le fruit des
carences de l’État dans le débat public et dans l’évaluation des projets
agricoles.
Pour aller dans le même sens, neuf
militants de la Confédération paysanne sont poursuivis pour avoir manifesté
leur opposition au projet industriel de la ferme des « Mille
vaches ». Ce projet, lui aussi, est la concrétisation d’un modèle agricole
capitaliste ultra-productiviste. Là encore, des militants syndicaux n’ont fait
que défendre des convictions, que nous partageons depuis toujours, en refusant
un modèle agricole qui se construit au détriment de l’agriculture paysanne et
au détriment de la transition écologique. Ces deux mobilisations sont
l’expression d’un même problème : celui de l’industrialisation de
l’agriculture, soutenue par les politiques de libéralisation européennes.
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